Projection azimutale

Territoires annexés par l'URSS 1939-1940

Les annexions soviétiques 1939-1940

Territoires annexés par l'URSS 1939-1940Le manque de connaissance de l’histoire de l’Europe orientale fait que nous ne saisissons pas toujours toutes les ramifications d’un événements. Dans le cas de l’expansionnisme russe de ces dernières années, le précédent de l’Entre-deux-Guerres est rarement vu, alors que, dans la région, le souvenir de ces manœuvres permet le rapprochement.

C’est ce qu’on observe avec les annexions effectuées par l’URSS en 1939-1940. Cette opération, rendue possible par l’alliance avec l’Allemagne nazie, a tendance à être oubliée, alors que cet accroissement territorial obéit à un objectif important, puisque l’URSS a réussi à le faire admettre par les Alliés, qui ont dû faire une exception à leur volonté de revenir aux frontières de 1937 et d’annuler tous les coups de force d’avant-guerre.

Parmi ces stratégies, une des plus importantes consiste à justifier a posteriori l’invasion par un vote populaire — strictement encadré, bien sûr ! C’est le cas dans la Pologne sous occupation soviétique, divisée en deux entités. Les assemblées issues des élections où seuls les candidats communistes étaient autorisés demandent leur rattachement à la République socialiste soviétique biélorusse et à la République socialiste soviétique ukrainienne, évidemment acceptés par les autorités soviétiques. De même, l’URSS signe à la fin de l’année 1939 des « traités d’amitié » avec l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie, qui lui permettent d’installer des bases militaires. Les 16-17 juin 1940, ces trois pays sont envahis et des gouvernements pro-soviétiques installés par l’occupant. Ici aussi, des élections contrôlées par les Soviétiques permettent la constitution de parlements qui transforment l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie en républiques socialistes soviétiques, qui demandent leur intégration à l’URSS, qui ne peut que répondre favorablement à cette sollicitation !

Logiciels utilisés : QGIS pour la conception de la carte, Illustrator pour la mise en forme.

Projection : projection azimutale équivalente de Lambert. Centre : 50°N et 24°E.

Topographie : Natural Earth.

Cette carte a participé au #30DayMapChallenge 2022 (jour 20 : « My favorite… »).

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La diffusion du christianisme dans l'Empire romain

Les débuts du christianisme

La diffusion du christianisme dans l'Empire romainLa carte sur les débuts du christianisme est un classique, mais qui pose quelques difficultés. La première est d’ordre purement factuel : il est extrêmement difficile (voire impossible) de mesurer avec un peu de précision l’extension du christianisme. En effet, le christianisme est né de l’enseignement d’un prédicateur marginal d’une religion minoritaire originaire d’une région périphérique de l’Empire : il passe donc largement inaperçu dans les sources romaines. On s’appuie sur les communautés chrétiennes connues — c’est pourquoi elles sont présentes sur la carte.

L’autre problème avec cette carte, c’est qu’elle n’indique que la présence notable de chrétiens dans telle ou telle région, c’est-à-dire qu’on n’est pas certain qu’il s’agisse d’un phénomène majoritaire. Le risque, ici, est de donner l’impression de régions (presque) entièrement acquises au christianisme, ce qui n’est pas le cas.

Néanmoins, pour l’instant, je n’ai pas trouvé mieux pour indiquer la diffusion progressive du christianisme dans l’Empire romain et ses voisins…

Logiciels utilisés : QGIS pour la conception de la carte, Illustrator pour la mise en forme.

Projection : projection azimutale équivalente de Lambert. Centre : 40°N et 19°E.

Côtes, lacs et cours d’eau : GSHHG (Global, Self-consistent, Hierarchical, High-resolution, Geography Database) et Natural Earth.

Cette carte a été élaborée comme support des cours et formations de l’Institut d’étude des religions et de la laïcité.

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L'Empire romain vers 300

L’Empire romain au début du IVe siècle

L'Empire romain vers 300J’ai voulu essayer de réaliser une carte en mode sombre. Le thème est très classique : les provinces romaines après la réforme de Dioclétien, mais avant les développements postérieurs qui sont plus souvent représentés (création des préfectures du prétoire, division de certains diocèses…).

J’ai poussé la logique au maximum en faisant du noir la couleur centrale.

L'Empire romain vers 300 (en anglais)Peu après le #30DayMapChallenge, j’ai retravaillé cette carte (en anglais) : vous pouvez tenter le jeu des différences ! N’hésitez pas à me dire celle que vous préférez.

Logiciels utilisés : QGIS pour la conception de la carte, Illustrator pour la mise en forme.

Projection : projection azimutale équivalente de Lambert. Centre : 40°N x 19°E.

Côtes, cours d’eau et lacs : GSHHG (Global, Self-consistent, Hierarchical, High-resolution, Geography Database).

Le règne de Dioclétien (284-305) est marqué par une série de réformes qui ont pour but de remettre d’aplomb l’Empire romain après des décennies de bouleversement. Une des plus importantes, et qui marque durablement l’Empire, est la refonte de l’organisation des provinces.

Pour gouverner pour efficacement les provinces, Dioclétien en réduit la taille : elles passent d’une cinquantaine à une centaine. Un territoire plus petit est plus facile à maîtriser, ce qui facilite l’exercice de la justice et la collecte des impôts. Il y a aussi une harmonisation : les statuts spécifiques de l’Égypte et de l’Italie sont supprimés et ces territoires divisées en provinces. Le gouverneur perd ses fonctions militaires.

Dioclétien ajoute un niveau intermédiaire entre les provinces et le pouvoir central : les diocèses — du grec dioíkēsis (territoire) — dirigés par un vicaire du préfet du prétoire, ou simplement vicaire. Celui-ci supervise les gouverneurs et peut prendre en cas de affaires qui remontaient auparavant jusqu’au préfet du prétoire, le principal collaborateur de l’empereur, en particulier l’appel des jugements prononcés dans les provinces. Le vicaire n’a lui aussi que des fonctions civiles.

La régionalisation de la préfecture du prétoire s’achève après la mort de Constantin (règne 306-337) : un autre niveau est ajouté entre les diocèses et le pouvoir central — les préfectures du prétoire. L’administration provinciale de l’Empire romain a alors sa physionomie définitive.

Cette carte a participé au #30DayMapChallenge 2021 (jour 9 : monochrome).

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OTAN

L’OTAN

OTANJ’ai voulu cartographier toute l’histoire de l’OTAN en une carte. La difficulté, ici, est de montrer toutes les extensions. J’ai choisi d’utiliser différentes teintes de bleu: 1 teinte pour chaque grande étape (guerre froide, ex-Bloc soviétique dans l’immédiat après guerre froide, extension récente dans les Balkans de l’ouest) avec des dégradés. Un vrai festival de bleus, ce qui était le défi du jour du #30DayMapChallenge !

L’organisation militaire de l’alliance est indiquée par les principaux commandements, avec deux bleus différents en fonction du « commandement suprême » (selon le vocabulaire de l’OTAN) de rattachement. Les grandes bases américaines sont aussi représentées. Pour ne pas surcharger, je n’ai pas indiqué les bases qui abritaient des commandements (la principale base de la 6e flotte américaine est Naples).

Logiciels utilisés : QGIS pour la conception de la carte, Illustrator pour la mise en forme.

Projection : projection azimutale équivalente de Lambert. Centre : 48°N x 4°E.

Côtes, cours d’eau, lacs : GSHHG (Global, Self-consistent, Hierarchical, High-resolution, Geography Database).

L’OTAN (Organisation du Traité de l’Atlantique nord) est née avec la signature de Traité de l’Atlantique nord (4 avril 1949). Il s’agit d’un système de sécurité collective : l’article 5 prévoit qu’en cas d’attaque d’un des pays membres, les autres lui portent secours. Elle est tournée contre l’URSS, qui apparaît alors très offensive (on est en plein blocus de Berlin) et surtout en mesure de conquérir aisément l’Europe occidentale. L’originalité de l’alliance est de disposer d’un commandement intégré, c’est-à-dire que le commandement interallié, qui s’est difficilement mis en place pendant les deux guerres mondiales, existe avant même le début des hostilités.

Pendant la guerre froide, l’OTAN s’élargit progressivement à tous les pays d’Europe occidentale, à l’exception de ceux qui ont déclaré leur neutralité. L’entrée de la RFA a été à l’origine de tensions, car elle impliquait la création d’une armée ouest-allemande. Le Pacte de Varsovie a été officiellement créé pour contrer la menace du « retour du militarisme allemand »… L’Espagne franquiste, malgré des accords bilatéraux avec les États-Unis, a été maintenue hôte de l’alliance. La transition démocratique a permis l’entrée dans l’OTAN.

La politique gaullienne a entraîné d’importants changements dans les structures de l’OTAN. En 1966, la France décide de quitter le commandement intégré, mais reste dans l’alliance. Les troupes étrangères présentes en France ont dû quitter le territoire, et le commandement a été relocalisé en Belgique. La France réintègre le commandement intégré en 2009.

La fin de la guerre froide ne fait pas disparaître l’OTAN bien qu’elle n’ait plus d’adversaire. Malgré la baisse des effectifs et de profondes réorganisations, l’alliance s’élargit à l’Europe orientale et conduit ses premières opérations en ex-Yougoslavie.

Le maintien de l’OTAN consacre l’alliance comme l’organisation de coopération militaire européenne… mais sous commandement américain ! On y trouve aussi les alliés les plus solides des États-Unis, et l’OTAN permet de les mobiliser. C’est le cas après les attentats du 11 septembre 2001, lorsque les États-Unis invoquent l’article 5 pour obtenir l’aide de ses alliés lors de l’invasion Afghanistan. Par la suite l’OTAN prend en charge les forces multinationales présentes dans le pays.

À partir des années 2010, le renouveau des tensions dans l’Est de l’Europe et l’ambiance de guerre froide avec la Russie conduisent à une nouvelle réorganisation et ne laissent pas présager une baisse du rôle de l’OTAN dans la coopération militaire européenne.

Cette carte a participé au #30DayMapChallenge 2021 (jour 8 : bleu).

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Évolution territoriale de la Hongrie 1867-1922

L’évolution territoriale de la Hongrie 1867-1922

Évolution de la Hongrie 1867-1922La question des nationalités en Autriche-Hongrie donne lieu à des cartes des différentes nationalités de l’Empire. Ici, j’ai utilisé les données du recensement de 1910 pour voir comment se répartissaient les Hongrois, étant donné que cette répartition va rendre très épineuse la question du tracé des frontières après la Première Guerre mondiale. Ces nationalités sont déterminées par la langue, et non par une entrée spécifique du recensement. En Cisleithanie, elle est établie selon la langue d’usage, c’est-à-dire la langue que l’on déclare utiliser dans ses interactions quotidienne ; en Transleithanie, elle est établie selon la langue maternelle.

Le dégradé de vert sert à indiquer la part des Hongrois — ou plus exactement des habitants de l’Empire ayant le hongrois pour langue maternelle. Les frontières de la Hongrie en 1867 (au moment du Compromis) et en 1922 (après la signature des différents traités de paix) ont été indiquées pour montrer qu’on passe d’un État multinational à un État-nation où les minorités nationales sont résiduelles mais avec d’importantes minorités hongroises chez ses voisins.

Logiciels utilisés : QGIS pour la conception de la carte, Illustrator pour la mise en forme.

Projection : projection azimutale équivalente de Lambert. Centre : 47°N x 21°N.

Côtes, cours d’eau, lacs : GSHHG (Global, Self-consistent, Hierarchical, High-resolution, Geography Database).

Après le compromis de 1867, le royaume de Hongrie absorbe la Transylvanie et retrouve les frontières qui étaient sensiblement les siennes avant la conquête ottomane. En cette période d’éveil des nationalités, ces frontières sont problématiques car elles comportent d’autres peuples : Croates, Roumains, Serbes, Slovaques, Slovènes…

À la fin de la Première Guerre mondiale, les frontières sont redéfinies en fonction des nationalités. Le traité de Trianon (4 juin 1920) aboutit à une importante contraction du territoire hongrois qui laisse en dehors des nouvelles frontières bon nombre de Hongrois, en particulier en Transylvanie. Les Hongrois sont particulièrement furieux de la cession à l’Autriche d’une partie de l’ouest du pays (le futur Land de Burgenland), et s’opposent au transfert du territoire. La médiation des vainqueurs aboutit à un référendum à Sopron et ses environs, qui choisissent de rester hongrois.

Par la suite, la Hongrie s’efforce de récupérer les régions peuplées de Hongrois, ce qui la conduit à participer au démembrement de la Tchécoslovaquie et à s’allier avec l’Allemagne pendant la Seconde Guerre mondiale.

Cette carte a participé au #30DayMapChallenge 2021 (jour 7 : vert).

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Pays du Pacte de Varsovie

Le Pacte de Varsovie

Pays du Pacte de VarsovieLes cartes un peu précises sur le Pacte de Varsovie sont assez rares, alors que des cartes montrant la structure et les bases de l’OTAN sont nettement plus courantes. Le but de cette carte est de tenter de combler ce manque.

Le dégradé de couleur sert à indiquer le départ d’un pays de l’alliance (l’Albanie) et la moindre intégration d’un autre (la Roumanie).

La structure de l’Armée soviétique est un des éléments les plus visibles, avec les districts militaires (voennye okruga) à l’intérieur de l’URSS et les groupes de forces (gruppy vojsk) pour les troupes stationnées à l’extérieur. En plus des sièges des commandements régionaux, les principales bases navales et aériennes ont été représentées.

Logiciels utilisés : QGIS pour la conception de la carte, Illustrator pour la mise en forme.

Projection : projection azimutale équivalente de Lambert. Centre : 50°N x 24°E.

Côtes, cours d’eau et lacs : GSHHG (Global, Self-consistent, Hierarchical, High-resolution, Geography Database).

Le 14 mai 1955, à Varsovie, l’URSS, l’Albanie, la Bulgarie, la Hongrie, la Pologne, la RDA, la Roumanie et la Tchécoslovaquie signent le Traité d’amitié, de coopération et d’assistance mutuelle, plus connu sous le nom de Pacte de Varsovie. Le prétexte est la menace que représente la création d’une armée ouest-allemande (la Bundeswehr) et son entrée dans l’OTAN. L’alliance complète les traités bilatéraux déjà signés entre l’URSS et les pays d’Europe orientale.

Le Pacte de Varsovie a une double structure. Le Comité politique consultatif, qui doit gérer l’alliance dans ses dimensions politique, économique et culturelle, est supposé se réunir deux fois par an et n’est convoqué qu’épisodiquement par l’URSS. Le Commandement unifié des forces armées commande toutes les forces du Pacte de Varsovie. Le commandant est aussi un vice-ministre de la Défense de l’URSS. Deux pays sont hors de la structure militaire : l’Albanie et la Roumanie. L’Albanie, très hostile à la politique de déstalinisation, suspend sa participation en 1961, et se retire de l’alliance en 1968. La Roumanie cherche à poursuivre une politique propre : elle obtient le retrait des forces soviétiques de son territoire en 1958, et le rappel de tous les conseillers militaires soviétiques en 1964.

La seule opération militaire du Pacte de Varsovie est l’opération Danube (août 1968). Les Forces de l’alliance envahissent la Tchécoslovaquie pour mettre fin au Printemps de Prague. L’alliance apparaît alors autant comme un dispositif classique d’assistance mutuelle qu’un moyen pour maintenir les régimes communistes.

L’effondrement du bloc soviétique s’accompagne de la fin du Pacte de Varsovie. L’alliance est formellement dissoute le 1er juillet 1991.

Cette carte a participé au #30DayMapChallenge 2021 (jour 6 : rouge).

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La Réforme protestante en Europe

La Réforme protestante

La Réforme protestante en EuropeLa carte religieuse de l’Europe au moment de la Réforme est un classique. J’ai longtemps hésité à m’y attaquer en raison de la complexité des figurés : beaucoup de frontières, au tracé souvent tortueux, des imbrications, et surtout des changements.

J’ai choisi de faire des grands aplats pour les grandes familles de la Réforme protestante, avec des hachures pour les zones mixtes. J’ai choisi d’indiquer les Églises hussites parce que j’en parle dans mon cours, et parce que je voulais indiquer les régions reprises par la Réforme catholique. La catholicisme est donc présent trois fois : là où il s’est maintenu, là où il vacille, et là où il reprend du terrain.

Les différentes rencontres et accords de paix, ainsi que les lieux importants pour la diffusion de la Réforme, sont représentés.

Logiciels utilisés : QGIS pour la conception de la carte, Illustrator pour la mise en forme.

Projection : projection azimutale équivalente de Lambert. Centre : 50°N x 12°E.

Côtes, cours d’eau, lacs : GSHHG (Global, Self-consistent, Hierarchical, High-resolution, Geography Database).

Traditionnellement, la Réforme protestante commence le 31 octobre 1517, lorsque Martin Luther, un religieux de l’ordre des augustin, placarde 95 thèses sur la porte d’une église à Wittenberg. Le geste n’a rien de révolutionnaire : pendant tout le Moyen Âge, l’Église latine a régulièrement connu des réformes, dont la plus importante — mais pas la seule — est la Réforme grégorienne. Cependant, depuis le XIVe s., l’Église est plus rétive face à ceux qui proposent des changements en voulant revenir à ce qu’ils considèrent être le christianisme originel — car tel est le sens du mot réforme. De nombreux théologiens, parfois perçus comme des précurseurs de la Réforme protestante, sont ainsi condamnés pour hérésie, par exemple le Tchèque Jan Hus, dont les enseignement se diffusent en Bohème à l’occasion de la Réforme et d’un rejet des Habsbourgs.

Les propositions de Luther n’ont pas pour but de rompre avec le pape ou de créer quelque chose de nouveau, mais de revenir aux fondamentaux des sources de la foi, du Salut, des sacrements et de l’organisation de l’Église. Le pape Léon X ne veut rien entendre et excommunie Luther. L’empereur, Charles Quint, tente de réduire la progression des idées de Luther mais les efforts de conciliations ou d’interdiction échouent. Seule la paix d’Augsbourg (1555) permet d’établir un statu quo avec le principe cujus regio, ejus religio (telle région, telle religion) : le prince peut choisir la religion de ses États.

D’autres penseurs développent leurs conceptions d’une réforme de l’Église, mais sans se rattacher à la pensée de Luther. À Zurich, Ulrich Zwingli réforme l’Église de la ville. Son action est poursuivie par Jean Calvin à Genève. Les expériences helvétiques donnent naissance à l’Église réformée (dite calviniste). Malgré des tentatives de rapprochement (colloque de Marbourg en 1529), réformés et luthériens conservent leurs différences.

En France, le développement de la Réforme entraîne de nombreux remous. La régente, Catherine de Médicis, réunis des théologiens catholiques et protestants pour trouver une formule de compromis (colloque de Poissy en 1561) avant de promulguer un édit de tolérance (édit de Saint-Germain, 1562), mais la première guerre de religion éclate quelques semaines plus tard. En 1598, l’édit de Nantes met fin au conflit en accordant aux protestants la possibilité d’exercer leur culte dans des conditions particulières.

La troisième grande famille du protestantisme naît en Angleterre. Henri VIII est un opposant déterminé des idées des réformateurs, mais il entre en conflit avec le pape, qui refuse d’annuler son mariage avec Catherine d’Aragon, qui ne lui a pas donné de fils. En 1534, l’Église d’Angleterre (ou anglicane) se sépare de Rome. Il ne s’agit que d’un schisme : l’Église d’Angleterre reste catholique mais cesse de reconnaître l’autorité du pape, dont la fonction est assurée par le souverain. L’adoption de la Réforme est progressif, complexe et marqué de rebondissements, comme un bref retour dans le giron romain sous la reine Marie Ire entre 1553 et 1558. L’anglicanisme prend forme sous Elisabeth Ire avec l’adoption d’une théologie essentiellement protestante, mais le maintien de nombreux éléments catholiques.

L’idée d’une réforme de l’Église ne se limite pas aux milieux protestants. Un penseur comme Érasme accueille d’abord favorablement les idées de Luther avant d’en rejeter les développements théologiques. Ce qu’on a longtemps appelé Contre-Réforme en se limite donc pas au rejet de la réforme protestante, mais participe à une réflexion sur l’Église romaine, si bien qu’on parle de plus en plus de Réforme catholique. Le concile de Trente (1545-1563) réaffirme les points essentiels du christianisme romain : rôle des Écritures, des sacrements, des saints, du clergé, mais procède à d’importantes modifications liturgiques et réorganise la formation du clergé (création des séminaires).

Cette carte a été élaborée comme support des cours et formations de l’Institut d’étude des religions et de la laïcité.

Cette carte a participé au #30DayMapChallenge 2021 (jour 3 : polygones).

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Saladin

L’ascension de Saladin

La difficulté principale de la cinquième carte de la série croisades vient de son sujet même : le remplacement des Fatimides et des Zengides par les Ayyoubides.

Après la deuxième croisade, le conflit entre les Zengides et les États latins se poursuit de manière indirecte en Égypte. Lors de l’installation des croisés dans la région, les Fatimides avaient réussi à conserver la ville d’Ascalon, qui leur avait servi de base pour lancer des raids quasi-annuels contre le Royaume de Jérusalem. Au cours du XIIe s., le califat shī’ite entre dans une période d’instabilité qui permet au Royaume de Jérusalem d’être relativement tranquille sur sa frontière méridionale. Après la fin de la deuxième croisade, le roi Baudouin III (règne 1143-1162) se tourne vers l’Égypte. Après s’être allié avec l’émir de Damas, il assiège Ascalon. Le siège est un succès, mais l’alliance précipite la conquête de la Syrie du sud par Nūr ad-Dīn, qui profite des mécontentements résultants de cet accord.

Le roi Amaury Ier (règne 1162-1174) poursuit l’action de son frère et profite des querelles internes au Califat fatimide pour tenter de prendre le contrôle de l’Égypte. L’ancien vizir Shawar se rend auprès de Nūr ad-Dīn pour récupérer sa position. Pendant ce temps, Amaury envahit l’Égypte en 1163 et obtient le paiement d’un tribut annuel. Peu après son départ, les armées zengides, conduites par Shīrkūh, accompagné par son neveu, Salāh ad-Dīn (Saladin), envahissent l’Égypte et réinstallent Shawar comme vizir. Cependant, celui-ci n’est plus qu’un homme de paille.

Voulant se débarrasser de l’encombrante protection de Shīrkūh, Shawar fait appel à Amaury. En 1164, il envahit l’Égypte. Pendant que Shīrkūh contient l’invasion, Nūr al-Dīn attaque la principauté d’Antioche. Amaury quitte l’Égypte pour aider son vassal, mais Shīrkūh a, entre-temps, accepté de quitter lui aussi l’Égypte.

En 1166, Shīrkūh envahit de nouveau l’Égypte en 1166, et Shawar appelle de nouveau Amaury à l’aide. Les opérations de 1166-1167 tournent à l’avantage des Latins, qui laissent des garnisons à Alexandrie et au Caire, avec paiement d’un tribut tandis que les Zengides se retirent d’Égypte.

Le fardeau financier et la présence de soldats latins conduit à un renversement des alliances. Devant les messages peu rassurants venus d’Égypte, Amaury envahit de nouveau le Califat fatimide, avec le soutien de troupes byzantines. Shawar appelle Shīrkūh à l’aide. Celui-ci arrive au Caire au début de 1169 et fait exécuter le vizir. Le calife al-Ādid choisit Shīrkūh comme nouveau vizir, mais celui-ci meurt peu après ; il est remplacé par son neveu Saladin. Le siège de Damiette, marqué par les dissensions entre Latins et Byzantins, est un échec, ce qui renforce la position du nouveau vizir. À la mort du calife, Saladin rétablit l’autorité (théorique) du calife abbasside sur l’Égypte et l’orthodoxie sunnite. L’autorité de Nūr al-Dīn est tout aussi théorique, et Saladin est le véritable homme fort de l’Égypte.

Nūr al-Dīn commence à se méfier de Saladin, qui proteste de sa fidélité, mais il meurt en 1174. Saladin profite des dissensions entre les héritiers de Nūr al-Dīn pour mettre la main sur les domaines des Zengides et refaire l’unité du Proche Orient. Saladin, qui a parfois l’image du défenseur de l’islam face aux croisés, a en réalité passé une bonne partie de sa carrière à combattre ses correligionnaires — même si ça se traduit par la destruction du califat shī’ite — ce qui rappelle que la dimension religieuse n’est qu’un aspect des conflits de la région.

Saladin se tourne vers les États latins. Comme auparavant, échecs et succès alternent. Il échoue même à s’emparer des forteresses des Assassins, ordre shī’ite et élément déstabilisateur de la région. Cependant, en 1187, Saladin inflige une défait décisive aux Latins lors de la bataille de Hattin. Il est en mesure de conquérir la quasi-totalité du royaume de Jérusalem. Seule Tyr résiste aux assauts des troupes de Saladin.

Dans le même temps, l’Empire byzantin connaît d’importantes difficultés, avec une montée du sentiment anti-Latins, ces derniers semblant profiter, voire favoriser les problèmes de l’Empire. En 1176, les armées byzantines parties soumettre le sultanat de Rūm subissent une grave défaite à Myrioképhalon. Cette défaite apparaît rétrospectivement comme un désastre digne des batailles du Yarmouk ou de Mantzikert, mais si l’Empire a définitivement perdu l’occasion de récupérer l’Anatolie, il reste en mesure d’infliger des défaites aux Turcs.

La mort de Manuel Ier Comnène (règne 1143-1180) est suivie de troubles importants. Il laisse derrière lui un fils mineur, Alexis II (règne 1180-1183), renversé par Andronic Ier Comnène (règne 1183-1185), qui tient la régence depuis 1182. Les sentiments anti-Latins culminent avec le massacre de 1182. Les Normands de Sicile envahissent de nouveau les Balkans et s’emparent de Constantinople, la deuxième ville de l’Empire, en 1185. La même année, Isaac Comnène, un cousin lointain, s’empare de Chypre et la gouverne pour son propre compte. Le successeur d’Andronic Ier Comnène, Isaac II Ange (règne 1185-1195) parvient à repousser les Normands, mais échoue à reprendre Chypre. Pire, son règne voit la révolte des Bulgares et la reconstitution d’un rival puissant dans les Balkans. Le ciel continue de s’assombrir pour l’Empire…

SaladinLa conquête de la Syrie-Palestine par Saladin

Cette carte a été élaborée comme support des cours et formations de l’Institut européen en sciences des religions.

ProjectionProjection azimutale équivalente de Lambert
Centre35°N, 32°E
DatumWGS 84
Hydrographie
(côtes, cours d’eau, lacs)
GSHHG (Global, Self-consistent, Hierarchical, High-resolution, Geography Database)

Licence Creative Commons
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La deuxième croisade

La deuxième croisade

Les rivalités entre princes musulmans du Proche Orient expliquent en partie le succès de la première croisade et le maintien des États issus de la croisade. Lorsque les Zengides refont l’unité de la region, les États latins sont directement menacés, ce qui entraîne le départ de la deuxième croisade.

Imād ad-Dīn Zengī est installé par les Seldjoukides comme atabeg de Mossoul (1127-1146). Il entreprend d’étendre son domaine. Il s’empare d’Alep et en devient émir (1128-1146). Il profite des querelles entre le prince d’Antioche et le comte d’Édesse pour s’emparer d’Édesse en 1144. Le reste du comté est progressivement conquis par Zengī et puis son fils, Nūr ad-Dīn, émir d’Alep (1146-1174) et de Damas (1154-1174).

L’événement a un retentissement considérable dans la Chrétienté : les Latins avaient connu quelques défaites cuisantes, mais jamais l’existence des États latins n’avait été remise en cause de la sorte. Eugène III (règne 1145-1153) décide d’organiser une nouvelle croisade. Il espère susciter la même ferveur que son prédécesseur Urbain II (règne 1088-1099), mais la bulle Quantum praedecessores (1er décembre 1145) ne suscite aucune vocation. Il faut attendre le discours de Bernard de Clairvaux à Vézelay (31 mars 1146) pour que la Chrétienté se mobilise, à commencer par Louis VII, roi de France (règne 1137-1180) et son épouse Aliénor d’Aquitaine. En Germanie, l’empereur Conrad III (règne 1138-1152) et son neveu, Frédéric Barberousse, décident eux aussi de partir.

Après sa prédication réussie, Bernard ne se joint pas à la croisade, même s’il endosse la responsabilité de l’échec de celle-ci.

En effet, la croisade se passe mal. En Germanie, les chevaliers du nord préfèrent faire campagne contre les populations slaves installées sur la frontière nord-est de l’Empire . Les terres des Slaves sont ravagées, ce qui ouvre la région à la conquête dans les années suivantes, mais il n’y a alors ni conversion (objectif initial) ni installation.

Conrad III et Louis VII partent séparément et décident de mettre leurs pas dans ceux des premiers croisés en passant par Constantinople et l’Anatolie. Les relations avec les Byzantins sont difficiles car le souvenir des violences des premiers croisés est encore vivace. De plus, l’empereur Manuel Ier Comnène (règne 1143-1180) craint un bouleversement des équilibres régionaux, voire une attaque directe. Les relations entre les deux empereurs sont mauvaises, et Conrad décide de passer au plus vite en Asie mineure. Les rapports avec Louis VII sont plus cordiaux, mais Manuel Comnène refuse de fournir des renforts et fait promettre de restituer à l’Empire byzantin les territoires conquis, comme l’avait fait Alexis Ier Comnène (règne 1081-1118) lors de la première croisade.

La traversée de l’Anatolie s’avère impossible. L’armée de Conrad enchaîne les défaites. Elle est rejointe par celle de Louis VII, ce qui permet une reprise de la progression, mais après leur lourde défaite devant le mont Cadmos (6 janvier 1448), les croisés décident de poursuivre par la voie maritime.

La première partie de la croisade est un désastre. L’armée croisée a perdu environ les trois quarts de son effectif avant même d’arriver sur le principal théâtre d’opération. Surtout, le fossé s’est creusé entre Latins et Byzantins. Ces derniers, assez rétifs à l’idée de croisade, voient d’un mauvais œil des croisés responsables de nombreux désordres dans l’Empire. Les croisés, de leurs côté, considèrent n’avoir pas été suffisamment soutenus, voire avoir été trahis, par les Byzantins. Par la suite, les autres expéditions empruntent la voie maritime.

Louis VII arrive à Antioche en mars 1148. Il est accueilli par le prince, Raymond de Poitiers (règne 1136-1149), oncle d’Aliénor, qui souhaite monter une expédition contre Alep et affaiblir les Zengides. Louis refuse, préférant achever son pèlerinage à Jérusalem — car la croisade est un pèlerinage — sans compter la rumeur d’une liaison incestueuse entre le prince d’Antioche et la reine. Conrad III arrive à Acre sur des navires byzantins.

L’objectif de la croisade change : le roi Baudouin III (règne 1143-1162) est plus préoccupé par l’émir de Damas. La place de Jérusalem dans l’imaginaire des croisés l’emporte : ils renoncent à contrer la menace zengide en Syrie du nord pour attaquer Damas et involontairement affaiblir des adversaires des Zengides en voulant protéger la ville sainte.

Damas est assiégée du 24 au 28 juillet 1148 mais, apprenant l’arrivée des troupes de Nur ad-Din, les croisés lèvent le siège. Louis VII — brouillé pour de bon avec son épouse Aliénor — et Conrad III repartent chez eux en 1149.

Le succès inespéré de la première croisade avait pu être perçu comme miraculeux, l’échec de la deuxième croisade est retentissant. Le comté d’Édesse n’a pu être préservé : le reste de son territoire est conquis par Nūr ad-Dīn en 1150. Les autres États latins sont toujours menacés par la consolidation des Zengides : Raymond de Poitiers est vaincu et tué lors de la bataille d’Inab (29 juin 1149) et Nūr ad-Dīn peut assiéger Antioche. Il échoue à prendre la ville, mais la principauté est durablement affaiblie.

Les seuls succès de la deuxième croisade sont liés à des opérations périphériques. Le pape a étendu la croisade à la péninsule Ibérique. Des croisés partis d’Angleterre et contraints d’accoster à Porto prêtent main forte à Alphonse Ier de Portugal (règne 1139-1185) lors du siège de Lisbonne (1er juillet – 24 octobre 1147). Plus à l’Est, des croisés venus de France et d’Italie participent à l’expansion du royaume de León et du comté de Barcelone.

La deuxième croisade La Syrie-Palestine pendant la deuxième croisade

Cette carte a été élaborée comme support des cours et formations de l’Institut européen en sciences des religions.

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Centre 35°N, 32°E
Datum WGS 84
Hydrographie
(côtes, cours d’eau, lacs)
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Le Proche Orient 1102-1130

La consolidation des États latins 1102-1130

La première croisade entraîne la création de quatre États latins (ou francs). Nombre de croisés repartent après la prise de Jérusalem. Ceux qui restent doivent maintenant se battre pour garantir la pérennité de ces États, d’abord en prenant le contrôle de la côte, puis en combattant les États de l’arrière-pays qui s’efforcent de reconquérir la région.

Ils vont être aidés par plusieurs facteurs. Contrairement à une idée fausse, il n’y a pas un choc frontal entre la Chrétienté et l’Islam. Passé la première croisade, les chrétiens d’Europe occidentale se soucient assez peu de l’Outremer, comme on dit alors. Les États latins peuvent néanmoins compter sur l’afflux réguliers de pèlerins armés venus combattre quelques temps. La création des ordres religieux-militaires, dont le prototype est l’ordre du Temple, s’efforce de maintenir l’esprit de la croisade : ils constituent une véritable armée permanente dont le rôle est fondamental dans la défense des États latins.

Néanmoins, la faiblesse des effectifs fait que même les désastres les plus effroyables — comme la bien nommé bataille du Champ du sang (Ager sanguinis) n’a pas d’effets à moyen terme, puisque quelques mois plus tard, une autre bataille arrive à des résultats inverse. Dans l’ensemble, ces alternances de victoires et de défaites est plutôt favorables aux Latins car elles ne remettent pas en cause l’existence des nouveaux États.

De même, la prise de Jérusalem a peu d’écho dans le monde musulman, et le lutte contre les Latins est surtout une affaire locale. Les motifs religieux, tant du côté chrétien que du côté musulman, ne sont qu’un éléments parmi d’autres, et les États latins se retrouvent dans un jeu compliqué d’alliances et de rivalités locales où les intérêts terre-à-terre priment sur les motivations religieuses.

Dans un premier temps, les États latins continuent de présenter un front uni face à des princes musulmans divisés, ce qui leur permet de continuer sur leur lancée victorieuse, mais les tensions finissent par s’installer. C’est surtout avec l’Empire byzantin que les tensions sont vives, en particulier autour d’Antioche, ville autrefois byzantine et dont le prince n’est autre que Bohémond, vieil adversaire normand. Celui-ci revient en Italie du sud et tente de nouveau l’invasion de la côte adriatique, mais il doit s’avouer vaincu et céder la Cilicie à Byzance.

Le Proche Orient 1102-1130 Les États latins 1102-1130

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Changements territoriaux à l'occasion de la première croisade

La première croisade 1095-1102

En mars 1095, les envoyés de l’empereur byzantin rencontrent le pape lors du concile de Plaisance. Le 27 novembre 1095, à Clermont, à l’issue d’un concile consacré à des problèmes de l’Église en France, le pape Urbain II (règne 1088-1099) dresse un portrait dramatique de la situation dans les territoires conquis par les Turcs et appelle les chevaliers à porter secours à leurs frères chrétiens en Orient : la première croisade est lancée, mais rien ne va se passer comme prévu.

L’appel du pape connaît un certain succès, mais pas dans ses termes. Un certain nombre de prédicateurs, dont le plus connu est Pierre l’Ermite, relaient cet appel, dans un contexte spirituel où Jérusalem occupe une place de plus importante dans la piété populaire. Là où Urbain II pensait aide à l’Empire byzantin, les fidèles entendent libérer Jérusalem. Pendant que les chevaliers — les professionnels de la guerre — se préparent, une croisade populaire part sans grande organisation. Certains départs sont marqués par des massacres de Juifs, accusés à tort de vouloir saboter l’expédition. Le trajet vers Constantinople n’est pas sans incidents, avec de nombreux accrochages en Hongrie. L’empereur Alexis Ier Comnène (règne 1081-1118) se dépêche de faire passer cette troupe indisciplinée en Anatolie, où elle est sévèrement battue par les Turcs en octobre 1096.

Peu après, la croisade des chevaliers, partie en août 1096, arrive à Constantinople. Les malentendus commencent. Alexis Comnène pensent ces combattants viennent se mettre à son service, tandis que les croisés, emmenés par Raymond de Saint-Gilles, comte de Toulouse, Godefroi de Bouillon, Robert Courteheuse, duc de Normandie, Robert, duc de Flandre, Hugues, comte de Vermandois et frère du roi de France, Étienne, comte de Blois et Bohémond, prince de Tarente, sont partis pour un pèlerinage armés. Pour compliquer les choses, Bohémond de Tarente a combattu les troupes d’Alexis Comnène lors de l’invasion normande des Balkans, ce qui conduit l’empereur à le soupçonner d’avoir des intentions cachées. Néanmoins, un accord est trouvé, et les chefs croisés prêtent serment de fidélité à l’empereur et s’engagent à lui restituer les territoires conquis. Un contingent byzantin se joint aux croisés.

La traversée de l’Anatolie est difficile, mais marquée par d’importants succès contre le Sultanat de Rūm. Les troupes byzantines  Les choses se gâtent à Antioche. La ville est prise à l’issue d’un siège difficile, mais les croisés se trouve assiégés à leur tour par une armée de secours. Étienne de Blois, pensant que tout est perdu, décide de rentrer en France ; sur son chemin, il croise l’armée de renfort conduite par Alexis Comnène et le persuade de rebrousser chemin. Les chefs croisés, notamment Bohémond, s’estiment trahis et décident de conserver leurs conquêtes, ce qui aboutit à la création des États latins.

Après avoir repoussés les assiégeants, les croisés continuent vers Jérusalem en rencontrant peu de résistance de la part des autorités locales. Jérusalem, conquise par les Fatimides à l’été 1098, est assiégée. La prise de la ville le 13 juillet 1099 donne lieu à un important massacre.

Le succès inespéré de la première croisade est lié à un concours de circonstances. En Anatolie, le sultan seldjoukide de Rūm a sous-estimé la menace et a continué à combattre ses vieux adversaires danishmendides. Par la suite, les Turcs anatoliens s’avèrent être des adversaires redoutables : les trois expéditions de renforts sont annihilées en 1101 et, lors des deuxième et troisième croisades, ils constituent un obstacle considérable. De même, en Syrie et en Palestine, les divisions locales — qui ont permis la conquête du sud de la Palestine par les Fatimides — ont empêché toute coordination. Cependant, les contemporains perçoivent cette victoire improbable comme le résultat de la faveur divine.

La première croisade s’achève par la constitution de quatre États latins — ou francs, noms générique utilisé dans la région pour désigner les Européens de l’ouest : le Royaume de Jérusalem, la Principauté d’Antioche, le Comté d’Édesse et le Comté de Tortose (par la suite, de Tripoli). Cependant, les Latins sont peu nombreux, ce qui pose assez rapidement la question de la survie de ces États.

Changements territoriaux à l'occasion de la première croisade La création des États latins pendant la première croisade

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Les conquêtes seldjoukides

La Méditerranée orientale 1045-1095

Dans la première moitié du XIe s., l’affaiblissement du Califat abbasside sur ses marges a permis l’expansion territoriale du Califat fatimide et de l’Empire byzantin. Sur sa lancée, ce dernier s’étend vers le Caucase en annexant des principautés géorgiennes et arméniennes.

L’arrivée des Turcs au Proche-Orient modifie les équilibres régionaux. En 1055, ils s’emparent de Bagdad. Tughril (ou Toghrul) laisse au calife un pouvoir symbolique et, formellement sous l’autorité de celui-ci, exerce la réalité du pouvoir avec le titre de sultan.

En quelques années, le Sultanat seldjoukide s’empare du Proche-Orient. En Anatolie, il inflige une série de défaites à l’Empire byzantin, ce qui lui permet de mener des raids sur le territoire impérial. Après la bataille de Mantzikert, les Turcs ne rencontrent plus guère d’opposition à cause de la guerre civile qui embrase l’Empire byzantin et peuvent s’installer durablement. Malgré un succès temporaire à Partsikhi, les Géorgiens ne peuvent s’opposer à la progression turque dans le Caucase et deviennent des vassaux du Sultanat seldjoukide comme les autres principautés locales.

L’Empire byzantin est aussi en difficulté à l’ouest. Au milieu du XIe s., des mercenaires normands sont venus en Italie du sud se mettre au service des potentats locaux avant de conquérir la région pour leur propre compte. En 1071, ils s’emparent de Bari, dernière ville byzantine de la région, avant de se lancer à l’assaut des Balkans dans les années 1080. L’Empire byzantin parvient à les repousser au prix de nombreux efforts.

Dans le même temps, les seldjoukides ont du mal à contrôler leur empire qui s’est étendu très vite. En Anatolie, les dynasties qui se sont installées s’éloignent peu à peu du pouvoir central. Si certaines entretiennent la fiction d’un lien avec le Grand seldjouk, d’autres prennent leur indépendance, en particulier une branche cadette des seldjoukides qui prend le titre de sultan al-Rūm (empereur des Romains). En Syrie et en Palestine, les héritiers des premiers gouverneurs seldjoukides se partagent la région et sont en conflit quasi-permanent.

Au début des années 1090, l’empereur Alexis Ier Comnène (règne 1081-1118) estime qu’il est temps d’amorcer la reconquête de l’Anatolie. Comme la tâche est immense, il décide de recruter des mercenaires pour assister les troupes byzantines. Pour cela, il s’adresse à son relais habituel en Occident : le pape.

carte du Proche Orient 1045-1095

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